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 Se reconstruire

Celles et ceux qui franchissent le seuil de notre association ont tous su qu’il ne s’agissait pas d’un mouvement de ras-le-bol passager, mais de la certitude qu’ils mettraient tout en œuvre pour s’extirper des griffes de leur tortionnaire.

Ils n’en sont pas tirés d’affaire pour autant. Il leur faudra faire preuve de beaucoup de prudence, de stratégie, pour échapper à la vigilance du pervers et dénouer les liens sans trop de casse.

En résumé, il s’agit de s’occuper de soi :
- Sur le plan corporel, son apparence, son physique, soins et activités sportives.
- Sur le plan social : retisser des liens amicaux et sociaux, clubs divers, associations.
- Sur le plan intellectuel et culturel, se régénérer, sortir, manifestations, animations, cinéma, théâtre, musique, etc.
- Sur le plan créatif, renouer avec sa créativité, peinture, écriture, couture, la liste est longue aujourd’hui, de ce qu’on peut pratiquer seul ou en groupe.

Le déclic, le choc et la prudence

La victime garde conscience qu’elle est niée. Elle éprouve de la colère, du ressentiment et de la frustration.

C’est pourquoi, lorsqu’elle réalise qu’elle n’est pas seule à vivre ce type de situation et qu’elle subit les conséquences d’une personnalité déviante, son compagnon ou sa compagne, c’est une révélation.

C’est un moment crucial, car il ne s’agit pas de réagir sous le coup de l’enthousiasme de la révélation. La victime, peut avoir tendance à courir vers son bourreau pour lui dire son fait, le menacer de partir par exemple. C’est une erreur : surpris, s’il sent vaciller l’univers sur lequel il règne en maître, le pervers va se déchaîner.

Une victime ne peut quitter l’enfer familial que si elle se sent raisonnablement solide, suffisamment forte pour faire face à la violence redoublée et à la guerre d’usure.

Quitter son pervers demande un travail à plein-temps. Partir se prépare mentalement, affectivement et psychiquement aussi.

Faire avant tout preuve de patience À l’association, nous comptons en moyenne au moins 5 ans pour se reconstruire. Même si elle s’en sort bien, une victime éprouve pendant longtemps une rage virulente. Elle sera capable de faire des rencontres, mais son état de détérioration est tel qu’elle aura du mal à croire qu’elle peut encore être aimée, à la différence du pervers, qui refera vite sa vie puisqu’il ne connaît pas le manque et n’investit pas la relation.

La stratégie de l’évitement Pourquoi éviter les conflits avec un pervers ? Simplement parce qu’on sait confusément, lorsqu’on est victime, qu’il ne faut pas rencontrer ce genre de personne en terrain découvert et que sa stratégie à elle ne peut en rien être semblable à celle de son bourreau, car elle n’est pas une guerrière.

Faites-vous entendre quand même Au fur et à mesure que le temps passe, les frustrations se multiplient. La victime souffre aussi d’une haine étouffée par le silence. Ce n’est que lorsqu’elle parvient à l’exprimer qu’elle peut guérir et renaître. Elle devra rechercher l’aide adéquate auprès d’un thérapeute, d’une association ou d’un simple proche, qui permettra de se régénérer et, pour pouvoir mieux les combattre et s’en extirper, de comprendre les mécanismes de l’emprise.

Cessez de donner trop Cessez de donner à tout-va et, surtout, aux agresseurs : ils ne vous en sont pas reconnaissants. Ayez systématiquement le réflexe de vous servir avant de trop servir à l’autre. Il vous faut apprendre à ne plus confondre établir une relation et vous donner totalement.

Rompez les liens un à un Bien sûr, il va vous falloir éviter tout rapport avec votre partenaire toxique et vous détacher de votre désir de maintenir sur lui un contrôle (comme en essayant de savoir ce qu’il fait, par exemple). Cela sera difficile parce que, lui, il ne vous lâchera pas.

Évitez donc de le revoir ou de lui téléphoner car vous recevrez immanquablement humiliations et rejets.

Il est parfois impossible de refuser le moindre contact avec le partenaire toxique qui, par le biais des procédures et en multipliant les incidents, cherchera à conserver et à vérifier son emprise sur vous le plus longtemps possible. Pour cela, les enfants lui offriront des occasions idéales.

Sachant qu’il vous entraînera dans le conflit, vous contaminera et vous atteindra à nouveau, il est souhaitable de vous préparer à ces situations répétitives et épuisantes. Apprenez à évacuer vos angoisses de mort, autrement dit la peur de n’être rien. Pour ne pas retomber sous l’emprise, il faut en règle générale que la relation soit terminée et avoir appris à vivre seul.

Nettoyez-vous du lien toxique : Soyez une bonne mère pour vous-même ou votre meilleure amie Un seul mot d’ordre : être une bonne mère pour soi, s’occuper de soi. Demandez-vous : « Si j’étais ma mère, que ferais-je pour moi ? » Vous serez surprise du nombre de réponses sympathiques que vous trouverez à cette question. Écoutez-les et mettez-les en œuvre.

Vous avez trop longtemps dispensé vos dons et vos soins à autrui. Rappelez-vous qu’ils étaient destinés à vous faire aimer en retour, alors qu’un vrai don n’a pas pour but d’être reconnu. Il faut maintenant vous consacrer à vous-même. Il y a dans la vie des rencontres qui rendent meilleur et plus heureux. Il y a aussi des rencontres qui n’apportent rien, mais détruisent. Fuyez ceux que vous avez appris à reconnaître et qui vous mettent instinctivement mal à l’aise.

Jetez votre honte aux orties. Les victimes ont même honte d’avoir honte. Même devant un thérapeute, elles minimisent ce qu’elles vivent et ce qu’elles ressentent, ou le tournent en dérision. Ce dont les victimes ont surtout honte, c’est d’avoir accepté de subir l’inacceptable, de s’être montrées aussi naïves, d’avoir été humiliées. Et peut-être plus encore d’avoir été désignées par le conjoint ou la constellation familiale comme malades et sans intérêt.

Or, être reconnue comme victime, oser le dire est le premier pas vers la libération. La honte vient aussi de ce que la victime intériorise les affects de son agresseur. Il s’est débrouillé pour la rendre violente ou la transformer en harpie ou en furie, engendrant un intense sentiment de culpabilité chez elle.

Osez penser du bien de vous Soyez fier de ce que vous savez faire. Recensez vos qualités et regardez autour de vous… Les autres vous paraissent sûrs d’eux ? Ils connaissent le doute et l’angoisse tout comme vous. Un sourire direct, une parole authentique, une gaîté non feinte les attireront. Sachez vous tourner vers des relations plus saines où vous vous sentirez à l’aise.

Il faut maintenant vous moquer de ce que l’on peut penser de vous. Il n’est pas obligatoire d’être parfait, c’est encore une croyance erronée héritée de votre enfance.

Sortez du burn out Ces années passées à donner plus que vous ne pouviez, à résister au bulldozer de la destruction systématique ont été épuisantes. Vous êtes totalement vidé, vous ressentez une fatigue extrême, d’origine psychique. Vous sentez que vous avez besoin de repos, de beaucoup de repos, de calme, et pour longtemps.

Dès que vous commencerez à dépasser cette sensation d’épuisement total, vous devrez vous remettre en activité – seule l’action soigne le burn out. Vous ne pouvez plus donner ? Ne donnez plus ! Rétablissez vos énergies, prenez soin de votre corps. Écoutez-le. Écoutez-vous.

Prenez soin de votre apparence. Un peu d’exercice, la marche d’un bon pas, dans la ville ou la nature, font le ménage des soucis. Reprendre la pratique d’un sport, se rendre à un cours de danse, participer à une chorale vous amènera à de nouvelles rencontres et de nouvelles amitiés.

Apprenez à vivre seul Il ne faut pas confondre vivre seul et n’être rien, ou vide La solitude nous apprend une façon d’être avec soi, de s’appréhender. Elle donne la possibilité de redécouvrir ses désirs, ses sensations, de se recentrer, de s’écouter. Ne vous isolez pas en refusant d’avoir des liens sociaux. Dans notre société, vous pouvez vivre seul mais vous ne serez pas isolé.

Rappelez-vous qu’il existe aujourd’hui nombre d’associations et d’activités, même dans les endroits les plus reculés.

Débrouillez-vous sans votre famille si possible, surtout si leurs réactions ne sont pas claires. Dès lors que vous êtes construit, que vous vous sentez bien, que vous n’attendez rien et, surtout, ne demandez rien, l’autre vient vers vous. Lorsque vous êtes en souffrance, l’autre vous fuit.

Donnez du sens à votre histoire La reconstruction commence dès l’instant où l’emprise s’est relâchée. La majorité des victimes se réveille un beau matin brusquement libre. Cependant, faire des projets d’avenir demande d’abord de pouvoir donner du sens à votre histoire et à votre souffrance.

Un deuil ne s’efface pas, il se surmonte ; puis on apprend à vivre avec lui. C’est ainsi que vous vous servirez de votre histoire avec votre ou vos pervers personnels pour la transformer en enrichissement et libération.

Donner du sens suppose de réfléchir pour prendre du recul. Petit à petit, seule ou avec l’aide d’un thérapeute, les morceaux disparates du puzzle de votre vie se mettront en place. Vous aurez un avis sur le chemin parcouru, et saurez ce qui vous a conduit à devenir la victime d’un pervers. Afin de faire le deuil de votre dépendance et mettre à distance les souffrances, vous pouvez écrire votre histoire, fragments ou récit complet, par exemple en vous servant des griefs que votre avocat vous a demandés comme base de départ pour l’assignation en justice. Vous considèrerez ensuite les pages remplies comme un objet fini ou une façon de témoigner pour vos enfants ou vos petits-enfants et serez plus à même de vous en éloigner, comme un sac trop lourd enfin déposé entre les feuilles.

Qu’avez-vous appris ? Quels ont été les moments clés de votre vie (en remontant à votre enfance et même en relevant les éléments commandés par le transgénérationnel) ? Quelles sont les caractéristiques de votre bourreau ? Comment vous a-t-il piégé ? Ses méthodes ? Par quels chemins êtes-vous passé ? Quelles résolutions avez-vous prises ? Quels garde-fous mettez-vous en place aujourd’hui pour vous protéger d’eux et de vous-mêmes ? Vous connaissez-vous mieux ? Autant de questions parmi bien d’autres… Autant de victimes, autant de réponses.

Un peu de créativité Découvrir sa créativité par le dessin, la musique ou toute activité de votre choix est une façon de s’exprimer et de reprendre votre place dans le monde et parmi les autres. Les thérapies Un travail sur soi étant nécessaire pour fermer la porte à la relation perverse, l’accompagnement d’un professionnel formé au harcèlement moral ou à la victimologie est souhaitable pour s’engager dans une relecture de son histoire.

Ici, une psychanalyse n’est en rien indiquée. Les thérapies d’affirmation de soi et celles où le thérapeute s’exprime et vous soutient avec empathie sont les mieux adaptées. Une thérapie de ce type vous offrira l’échange dont vous avez été privé depuis longtemps.

Le thérapeute, par son écoute active, vous aidera à retrouver votre identité et votre énergie, et à vous débarrasser de votre culpabilité. Puis il vous accompagnera dans un travail sur les blessures et les fractures de l’enfance, afin de vous permettre de comprendre la signification de certains événements et de les dépasser afin de ne plus réactiver les schémas et les conduites anciennes.